vendredi 9 juin 2017

Le retour remarqué du Dindon Sauvage à Pointe Pelée




C'est à partir du 9 décembre 2013 que je commence à pouvoir photographier le Dindon Sauvage / Meleagris gallopavo gallopavo / Wild Turkey lors de mes sorties dans la région de Québec. Au Québec, les premières observations datent de 1976 et la nidification du dindon fut pour la première fois confirmée en 1984. Imaginez que ce poids lourd de la faune aviaire nord-américaine n'a osé traverser les frontières américaines que depuis 40 années. C'est très peu. Pour avoir la chance d'observer en nature cet oiseau très farouche, il fallait nous diriger au sud de Montréal, le long de la frontière étasunienne. Et c'est ce que je fis le 13 avril 1991 en allant observer sept dindons sur le rang Fisher, à Saint-Bernard-de-Lacolle. Le printemps est le moment idéal de l'année pour ce faire puisque le mâle émet de puissants "glouglous" qui s'entendent à plus d'un kilomètre et demi. Il est alors possible d'observer un mâle qui se pavane devant quelques femelles médusées par autant d'artifices.


Ce Dindon sauvage mâle est en possession de tous ses moyens pour impressionner une femelle ou faire fuir un intrus. Photo réalisée le 12 mai 2017 dans le parc national de Pointe-Pelée.

Mais comment faire pour s'approcher assez d'un site de pariade sans faire fuir les oiseaux ? Malgré leurs dimensions impressionnantes, ils sont plutôt peureux, voire même furtifs. Je n'aurais jamais cru qu'un jour je réussirais à les approcher et encore moins que ça se réaliserait à Pointe Pelée, en Ontario. Avant mon voyage de cette année, j'avais fait cinq voyages printaniers dans ce parc national, dans les années 1970-1980. Et le Dindon Sauvage ne s'observait pas dans ces années là. En fait, il avait quitté le parc national depuis une bonne soixantaine d'années. Par contre, je me souviens très bien qu'un autre gros oiseau, le Faisan de Colchide / Phasianus colchicus / Ring-necked Pheasant occupait les lieux et il était au moins entendu à chacune de mes visites. Je ne l'ai pas entendu en mai 2017.


C'est donc avec une grande surprise que je constate la présence très ostentatoire du dindon en 2017. Dès ma première présence sur le site, à bord du train de 06h00 qui se dirige vers la pointe, j'en repère un perché très haut dans les grands arbres sans feuille. Il faut savoir que les dindons se perchent souvent dans les arbres pour passer la nuit à l'abri des prédateurs terrestres que sont les renards, les coyotes et autres. Par la suite, ce sont leurs glouglous retentissants qui nous permettent de savoir qu'ils sont bien là, éparpillés le long de la route asphaltée qui fait environ huit kilomètres de longueur, partant de l'entrée du parc et allant jusqu'à l'extrémité de la pointe. J'apprends sur un panneau dans le centre d'interprétation du parc que le dindon est de retour après une absence d'une centaine d'années.


Trois Dindons sauvages déambulent le long de l'unique route asphaltée menant de l'entrée du parc jusqu'à la station située à la pointe. Difficile de les manquer en ces lieux. Par contre, en forêt, lorsqu'ils sont silencieux, c'est une autre paire de manches. Photo réalisée le 11 mai 2017 au parc national de Pointe Pelée, Ontario.


Connaissant peu les moeurs de cette espèce, je croyais que le mâle ne faisait plus de pariade au début de mai. Mais une rencontre inespérée, faite le matin du 12 mai 2017, le dernier jour de mon séjour à Pointe-Pelée, se concrétise de façon inattendue.


Anne et moi parcourons le sentier non aménagé Parcelle de l'oponce (cactus) à la recherche de quelques espèces qui nous ont échappé jusque là. À la fin de la boucle, voilà que j'entends des glouglous et je vois alors apparaître une femelle se déplaçant lentement à quelques mètres de distance. 




 
 Elle passe tout près, me permettant cette photo de sa tête.






Elle continue lentement sa route en suivant le même et unique sentier que le nôtre. Nous la perdons de vue à un détour. Et voilà qu'un glouglou pénétrant me fait tourner la tête pour apercevoir, cette fois ci, un mâle qui fait la roue. Wow !  Il provient du même endroit que la femelle et il semble très probable qu'il empruntera exactement le même chemin que sa dulcinée. Et c'est ce qu'il fait.


 


J'hésite un peu à rester sur son chemin, car je ne sais pas quel sera le comportement d'un mâle protégeant sa femelle. Je m'écarte un peu du chemin et je reste sans bouger, ma caméra dirigée vers lui. Après une brève hésitation, il se dirige vers moi. Il passe encore plus près que ne l'a fait la femelle. Ce qui me frappe le plus, c'est cet appendice qui part du front et qui se prolonge au-dessus du bec pour le recouvrir tout à fait selon l'excitation de l'oiseau. Et cette transformation se produit très rapidement et peut nous permettre de juger du degré de dangerosité de l'oiseau envers nous.
















Je suis vraiment comblé par toute cette démonstration. Il est bien clair maintenant que la "roue" ne sert pas seulement qu'à attirer les femelles, mais aussi à écarter de l'élue les autres mâles ou les possibles prédateurs, dont je pourrais faire partie (du point de vue de l'oiseau, bien évidemment).


Le mâle continue donc son chemin et nous le suivons très lentement. C'est alors que nous observons la femelle alors qu'elle prend un bain de sable, toujours sous la surveillance bienveillante du mâle.






Toute une démonstration comportementale vécue en cette belle journée, dans ce site exceptionnel qu'est le parc national de Pointe-Pelée.


@ bientôt.





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